Dégradation de l’essence: mythe ou réalité?

80% des interventions en atelier ont pour cause l’utilisation d’essence dégradée durant la saison ou une mauvaise séquence de remisage. Résultats : démarrage difficile ou impossible, puissance réduite et fonctionnement chaotique nécessitant le nettoyage ou le remplacement du carburateur.

Voyons ensemble pourquoi l’essence se dégrade, quels sont les conséquences de cette dégradation sur les moteurs 2 et 4 temps et surtout, comment lutter contre ces effets.

De l’essence, c’est quoi exactement

Le pétrole brut est un mélange hétérogène d’hydrocarbures extrait par forage du sol. Ce mélange est inutilisable tel quel. Ses composants doivent être séparés afin d’obtenir les produits raffinés comme l’essence.

L’essence est un liquide inflammable obtenu par la distillation du pétrole et employé comme carburant, soit un combustible qui alimente un moteur et qui transforme son énergie chimique en énergie mécanique.¹ L’essence est en fait un mélange complexe d’environ 40 hydrocarbures principaux.

Contrairement à la croyance populaire voulant que l’essence soit un composé plutôt stable, les carburants courants se dégradent au fil du temps. Que ce soit dans un bidon de dix litres, dans un réservoir de cinquante litres ou en cuve de dix mille litres, cette dégradation est inévitable et continue.

Phénomènes chimiques en cause

Différents phénomènes chimiques sont responsables de la dégradation de l’essence.

1- Volatilité

La volatilité est l’aptitude qu’a le carburant de se transformer en vapeurs. Ce phénomène peut être observé lorsque nous circulons près d’une station-service au moment du ravitaillement de leur réservoir par camion par exemple.

Cette volatilité est nécessaire puisque ce sont ces vapeurs qui s’enflamment dans la chambre de combustion. Malheureusement, à cause de cette volatilité, l’indice d’octane de l’essence chute et l’essence se dégrade, jours après jours.

2- Évaporation

L’évaporation est une conséquence de la volatilité. Dans le réservoir, les gaz volatiles sortent par les évents, on dit alors que les réservoirs « respirent ». Pour les moteurs conçus ces 10 dernières années, un système de base a été mis en place pour réduire cette évaporation mais on ne parle toujours pas d’un système hermétique. Le volume initial d’essence diminue malgré tout, entraînant du même coup une diminution de l’indice d’octane et de la qualité de l’essence.

3- Condensation

Lors des échanges entre l’air ambiant, les vapeurs d’essence et l’air présent dans le réservoir, il se crée de la condensation sur les parois du réservoir. De fines gouttelettes d’eau se forment sur les parois et cette eau, plus lourde que l’hydrocarbure, s’accumule dans le fond du réservoir. Les petits moteurs 2 et 4 temps réagissent très mal à la présence d’eau dans le système d’alimentation. 2 ou 3 gouttes suffisent pour entraîner l’arrêt du moteur. De plus, la partie métallique du réservoir émergée subit aussi de la corrosion.

4- Oxydation

L’essence en contact avec l’oxygène dans l’air occasionne une réaction d’oxydation. Il se crée alors des radicaux libres qui entraine une polymérisation de composantes de l’essence appelés les alcènes, des hydrocarbures insaturés. Ces gommes sont des particules de couleur et consistance de type caramel mou, à forte odeur qui se diluent difficilement.

À ce point, l’essence a alors changé d’odeur pour devenir rance, cette odeur caractéristique de ‘vieux gaz’. Elle a également changé de couleur. L’essence dégradée s’enflamme moins facilement ou pas du tout, selon le niveau de dégradation.

L’oxydation peut aussi occasionner la formation de rouille à l’intérieur du réservoir à essence s’il est en métal.

Conséquences de la dégradation de l’essence sur vos moteurs 2 et 4 temps

Comme nous venons de le voir, la dégradation de l’essence se manifeste de plusieurs façons: l’indice d’octane qui diminue, de la gomme et de la rouille qui se forment et de l’eau qui s’accumule dans le carburant. Lorsque vous alimentez votre équipement à moteur 2 ou 4 temps avec de l’essence dégradée, vous observez alors un démarrage difficile, un mauvais fonctionnement, voire même une panne complète du moteur.

Comme le mentionne le fabricant américain de tondeuse à gazon et de souffleuses à neige TORO²:

Une fois que l’évaporation atteint un certain point, il sera difficile voire impossible de démarrer la machine. Au fur et à mesure que les composés s’évaporent, le combustible forme des dépôts gommeux bruns dans le système. Avec suffisamment de temps, les dépôts gommeux deviendront un vernis dur. Des dépôts gommeux et des vernis peuvent obstruer les passages dans le carburateur empêchant le moteur de fonctionner ou de faire mal tourner le moteur (surtension, manque de puissance, décrochage, etc.). Les dépôts peuvent également provoquer une fuite de carburant du carburateur s’ils empêchent l’étanchéité de l’aiguille du flotteur.

Vous réussissez à démarrer votre équipement, même à l’utiliser normalement, et croyez que votre équipement n’est pas affecté par la dégradation de l’essence ? Il n’en est rien. La gomme est véhiculée par le carburant pendant le fonctionnement, se concentre et se dépose sur son chemin. Tant que le moteur est chaud il n’y a pas collage, mais dès que le moteur refroidi, la polymérisation s’effectue et la gomme durcie. Il n’y aura alors pas de prochain démarrage avant une intervention en atelier.

Les dégâts causés par l’essence dégradée peuvent être très importants. Aucun produit chimique n’en vient à bout si la gomme est polymérisée. Il faut tout démonter et nettoyer.

Comment lutter contre les effets de la dégradation de l’essence

Comme nous l’avons vu, la dégradation de l’essence est inévitable. Il est pourtant possible de mettre quelques bonnes habitudes en place pour réduire l’impact de cette dégradation. Voici 7 façons concrètes d’y arriver.

1- Un bidon adapté aux hydrocarbures

À l’époque des essences avec plomb, n’importe quel récipient pouvait servir pour transporter et entreposer l’essence. Avec l’arrivée des essences sans plomb, ce n’est plus le cas parce que l’essence sans plomb s’attaque au plastique. La réaction chimique en cause laisse des dépôts de fines particules et lorsque l’essence est ajoutée au réservoir et circule dans le moteur, vous risquez un blocage de carburateur.

2- Un bidon hermétiquement fermé

Si l’air peut circuler et se renouveler dans votre contenant, de l’air non saturé peut entrer et de l’essence s’évapore, entrainant alors le phénomène d’oxydation de l’essence. Si le bidon est hermétiquement fermé, la quantité d’oxygène susceptible de réagir avec l’essence est très faible, et n’aura que peu d’influence sur sa qualité.

3- Un réservoir ou un bidon rempli à pleine capacité

Si un bidon non hermétique ou votre réservoir est rempli jusqu’au goulot, la faible surface de contact avec l’air limite l’oxydation de l’essence.  Les composés volatils s’évaporeront moins rapidement et l’essence se dégradera moins rapidement également.

Par contre, il est important de noter que plus votre bidon sera vide, même s’il est hermétique, plus il y aura d’oxygène à l’intérieur. De là l’importance de choisir un petit bidon et de le garder le plus plein possible.

4- Essence fraiche

Puisque l’essence n’est pas un liquide stable, s’approvisionner en essence pour un maximum de 30 jours est une recommandation cruciale.  Au-delà de ce délai, les répercussions de la dégradation de l’essence pourront se manifester sur le fonctionnement de votre équipement.

5- Un indice d’octane élevé

L’utilisation d’une essence super sans plomb avec un indice d’octane élevé permet de réduire la présence d’alcènes qui sont responsables de la formation de gommes dans le système d’alimentation de votre moteur.

Il est important de suivre les recommandations du manufacturier de votre équipement en ce qui a trait à l’indice d’octane.

6- Éviter l’éthanol

L’éthanol est un acide qui provoque des dommages au système d’alimentation en carburant ainsi que des difficultés de démarrage et des ratés du moteur. Même si une teneur en éthanol de 10% est acceptable, il demeure préférable de choisir une essence qui n’en contient pas.

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7- Utiliser un stabilisateur d’essence

L’essence laissée dans un moteur lors du remisage ou même pendant les pauses entre les usages périodiques peut encrasser le carburateur. Les pièces de moteur non lubrifiées peuvent aussi se corroder. L’humidité peut également s’accumuler dans le système d’allumage. Vous pouvez éviter la plupart de ces problèmes en utilisant un stabilisateur d’essence. Le stabilisateur d’essence a pour fonction de limiter l’oxydation et d’inhiber la corrosion.

Il existe plusieurs produits sur le marché. Certains peuvent prolonger la stabilité de l’essence pendant 6 mois, 1, 2 et même jusqu’à 3 ans.

Aide-mémoire des meilleurs trucs pour lutter contre la dégradation de l’essence

Sources

  1. https://fr.wikipedia.org/wiki/Carburant/
  2. https://www.toro.com/fuelfacts/Fuel-Facts-Download-Final-2013.pdf

Références :

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